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Aubrac : «Décidément, Caluire ne me vaut rien»

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par Olivier Bertrand
publié le 11 avril 2012 à 11h06

On avait déjà mangé une fois ensemble, en mai 2009, au plateau des Glières, en Savoie. Raymond Aubrac venait faire de la résistance à Nicolas Sarkozy, rappeler devant 3 000 personnes les acquis perdus du Conseil national de la résistance. Je m'étais alors frotté une première fois à son humour grinçant. Au dîner, la veille du rassemblement, dans un petit chalet du coin, je m'étais retrouvé entre lui et Stéphane Hessel. On fait pire comme voisins.

Après m'avoir demandé où je travaillais, Raymond Aubrac, fondateur avec son épouse Lucie et Emmanuel d'Astier de la Vigerie du premier journal Libération en juillet 43 (1), m'avait lancé un méchant «j'ai beaucoup aimé ce journal». Puis il s'était intéressé aux combats des journalistes aujourd'hui, avant de me parler des siens, dans des collèges et des lycées où il allait souvent parler de résistance depuis la mort de sa femme. «Avant, c'était Lucie qui s'occupait de cela. A sa mort, je me suis retrouvé profondément seul, j'ai eu besoin de prendre la suite.» Il l'avait déjà fait un peu, avec elle, au milieu des années 70, remarquait une profonde évolution. Avant, les élèves l'interrogeaient sur les armes, les stratégies, les moyens de la résistance. A présent, beaucoup l'interrogeaient sur les raisons de résister.

Puis on s’est retrouvés en juin 2010 à Lyon, pour un déjeuner cette