Au moins 38 témoins, et pas une main secourable. Comme dans le récent film de Lucas Belvaux, mais cette fois en mer Méditerranée, une tragédie a eu lieu, il y a un an, sans que personne ne réagisse. Et sans que personne, aujourd'hui encore, n'assume ses responsabilités. Hier, à Paris, quatre ressortissants éthiopiens, soutenus par plusieurs ONG (la FIDH et le Gisti notamment), ont porté plainte contre X pour non-assistance à personne en danger. Ils mettent en cause la passivité, entre autres, de l'armée française, soupçonnée d'avoir eu connaissance du drame qui se jouait en mer pour des dizaines de clandestins sans être intervenue. Une accusation rejetée par le ministère français de la Défense qui parle de «gesticulation».
Dérive. Tout commence dans la nuit du 26 au 27 mars 2011. Cela fait une semaine que les Occidentaux ont lancé leur campagne de raids contre les forces du «Guide» libyen. Un canot pneumatique quitte le port de Tripoli avec à son bord 72 personnes - des migrants issus d'Afrique subsaharienne qui fuient les violences dans une Libye où ils sont assimilés à des auxiliaires du régime. Leur objectif : rallier l'île italienne de Lampedusa. Mais, rapidement à court de carburant, ils perdent le contrôle de l'embarcation. Leur dérive va durer quatorze jours. Privés de nourriture et d'eau, les passagers - dont deux bébés et plusieurs femmes - vont mourir les uns après les autres. Quand le 10 avril, par une tragique ironie de l'histoire, le bat