Alain Garrigou (1), agrégé d’histoire et de sciences politiques, professeur à l’université Paris-X, passe au scanner le casting gouvernemental.
Le modèle de l’homme blanc s’est imposé dans le recrutement des cabinets ministériels. C’était prévisible ?
Tellement probable. C’est surtout un problème de réservoir. Les membres des cabinets se recrutent soit dans la haute administration, soit dans le vivier des militants. Dans les deux cas, ce sont des milieux surmasculinisés. Dans la haute administration, ils sortent pour la plupart de l’ENA. S’il arrive qu’une femme en sorte major, et s’il y a maintenant une année de prépa à l’ENA dédiée aux jeunes issus de la diversité, on est très très loin de l’égalité. Il faut ajouter que ces postes sont des boulots d’enfer, qui nécessitent d’être corvéables 24 heures sur 24. Les femmes sont sans doute moins enclines à l’accepter. Dans le détail, les postes de chargés de mission sont surtout occupés par des trentenaires. L’âge où l’on se décide ou non de s’investir dans une vie familiale.
Le gouvernement a pourtant affiché parité et diversité. C’est une façade ?
Au contraire, c’est un tour de force. Quand on pense aux mécanismes de sélection sociale selon les métiers, quand on sait qu’en termes d’élite ce sont surtout les mâles - j’ose le mot - qui émergent, je parlerai presque de prouesse. La politique, la conquête du pouvoir comme un trophée, reste un univers très masculin, viril, dominant. Je ne fais pas un compliment à mon genre, mais c’est la réalité. Songez qu’il a fallu attendre 1986 pour qu’une femme devienne agrégée de sciences politiques. Dans ce gouvernement qui aligne 17 femmes pour 17 hommes, on a fait preuve