C'est une question, venue d'une prisonnière basque. L'entêtement d'une recluse de Fresnes, bientôt quadragénaire, amoureuse d'un homme enfermé lui aussi, dans une prison espagnole. «Puis-je avoir un enfant ?»
Quand elle sera libérée, cette femme ne pourra peut-être plus tomber enceinte. Question d'âge. Pour contourner l'impossibilité matérielle, elle a demandé à l'équipe médicale de sa prison de pouvoir bénéficier d'une Assistance médicale à la procréation (AMP). Les soignants ont alors décidé de saisir l'Académie de médecine : le groupe de travail qui planche sur le sujet depuis six mois rendra son avis en octobre devant une assemblée plénière composée de pontes qui n'ont rien de gauchistes échevelés. «Je m'attends à quelques remous dans la salle», confie, amusé, le responsable du groupe de réflexion.
La science doit-elle artificiellement rétablir ce que les murs rendent impossible ? Certes cette question touche peu d’hommes et de femmes - cinq à dix par an selon l’Académie. Mais elle suscite une réflexion éthique majeure : sur la procréation comme sur le sens de la peine de prison.
«D'emblée, parmi nous, confie le professeur Henrion, gynécologue-obstétricien et rapporteur du groupe de travail, les réactions ont été passionnelles.» Dans les jolis appartements de l'Académie, rue Bonaparte à Paris, deux clans se sont formés. «Quel est le sens de la détention ? questionne Roger Henrion. C'est d'abord une sanction, disent les uns : attention