«Avant», il y avait ceux qui faisaient «la tournée des popotes» sans complexes, bons alimentaires à la mairie, colis de vêtements au Secours populaire, paniers repas aux Restos du cœur… «Profiteurs», jasaient certains. Il y avait aussi tous ceux qu'on ne voyait jamais. La petite vieille toute ratatinée qui ne sortait pas de sa maison, 700 euros de pension, un bouillon d'échalote le soir et pas de chauffage en fin de mois. Le monsieur digne, entre fin de droits et retraite, le jeune sans diplômes ni RSA, le couple de quadragénaires surendettés… Honteux d'être devenus pauvres, et trop fiers pour faire la queue aux guichets de l'aide sociale. Dans une ville de 6 700 habitants, tout se sait. Entre «profiteurs» et «silencieux», quelque chose ne fonctionnait pas à Saint-Flour, sous-préfecture du Cantal.
En 2007, le maire (qui est aussi sénateur UDI), Pierre Jarlier, décide de faire un état des lieux et convoque une centaine de partenaires sociaux. Le constat est rude : dans ce département au PIB le plus faible de France, un habitant sur trois est à la retraite, souvent en dessous du seuil de pauvreté, à la merci d'une facture de chauffage excessive. Le taux de chômage, très bas, moins de 5%, cache une vraie misère sociale : «Les demandeurs d'emploi sont partis, car il n'y a pas d'emplois», explique Pierre Jarlier. Ceux qui sont restés se cachent : «Les pauvres, ici, viennent de la ruralité, un milieu où on ne se plaint pas, où on ne demande r