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Libération
Interview

«L’évaluation, une obsession»

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Bénédicte Vidaillet Psychanalyste
publié le 16 janvier 2013 à 19h36

L'évaluation n'est pas qu'une méthode de management, c'est devenu un mode d'organisation qui s'est propagé dans tous les secteurs d'activité, du jeu télévisé à l'action politique. Psychanalyste, maître de conférences en sciences des organisations à l'université de Lille-I, Bénédicte Vidaillet vient de publier Evaluez-moi ! (1), essai sur la nouvelle obsession du siècle.

L’évaluation est une méthode utilisée depuis longtemps. Qu’est-ce qui a changé ces dernières années ?

En trente ans, cette pratique s’est diffusée dans toutes les organisations. Pas seulement dans les entreprises, mais aussi dans le secteur public, l’université, les associations, la santé… L’évaluation est partout. A l’hôpital, les services d’urgence commencent à être évalués selon le temps d’attente. Un voyant rouge signale aux soignants leur retard en temps réel. Les agences de notation égrènent l’actualité de leurs verdicts. Selon une enquête réalisée en France auprès de salariés d’entreprises de plus de 50 personnes, 73 % des gens interrogés disent avoir «un retour sur leur performance individuelle». L’action politique est aussi concernée. En 2007, le président Sarkozy impose à chaque ministère des feuilles de route avec des objectifs ciblés et mesurés. Ce qui n’était autrefois qu’un repère parmi tant d’autres est devenu le moteur central des organisations dont tout découle : objectifs, budgets, primes, évolution de carrière, etc.

Pourquoi une telle prolifération ?

L’idéologie de l’évaluation ne se développe pas à notre insu. Globalement, tout le monde se plaint de la méthode qui engendre pression, stress et compétition voire triche