Cette féministe française les avait prévenues. «N'allez pas en Tunisie, c'est bien trop dangereux. Elles n'ont rien voulu entendre.» Depuis leur irruption sur la scène internationale, les Femen fascinent et dérangent à la fois. Pas seulement ceux qu'elles combattent, intégristes, dictateurs et autres proxénètes, mais aussi parmi celles qui devraient être leurs soutiens évidents, les féministes. Le dernier épisode en Tunisie confirme ce sentiment étrange, mélange d'attention admirative, de perplexité et/ou de rejet.
Face à l'isolement et au traitement disproportionné réservés à Amina et aux trois autres militantes, face à l'urgence de la situation, des féministes françaises sont sorties de leur silence. Dans une pétition publiée hier dans Libération, Elisabeth Badinter, Safia Lebdi, conseillère régionale EE-LV, un temps proche des Femen, et d'autres personnalités comme la cinéaste Agnès Jaoui demandent la libération immédiate des jeunes femmes. Une démarche appuyée par d'autres associations féministes comme la Clef (Coordination du lobby européen des femmes) ou Femmes solidaires. Mais, en off, les mêmes qui défendent la jeune Tunisienne se montrent nettement moins consensuelles. «Aujourd'hui Amina risque douze ans de prison. C'est une gamine… Le prix à payer est trop lourd, dit cette féministe française. Les Femen envoient leurs militantes au casse-pipe. Elles n'assurent ni gîte ni protection. Elles veulent des soldates.»