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Interview

«Avec le numérique, le prof se recentre sur le cœur du métier»

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La réforme des rythmes scolairesdossier
Entretien croisé avec le ministre de l’Education, Vincent Peillon, qui veut accroître la place de l’ordinateur à l’école, et le philosophe Michel Serres.
publié le 9 juin 2013 à 22h36

Le ministre de l'Education nationale, Vincent Peillon, annonce aujourd'hui toute une série de mesures pour faire entrer l'école dans l'ère du numérique. L'occasion de débattre de cette révolution dans l'enseignement avec le philosophe et historien des sciences Michel Serres, passionné par le sujet, et dont le dernier livre Petite Poucette (1) évoque cette génération grandie avec des tablettes.

En quoi le numérique bouleverse-t-il l’école ?

Michel Serres : La révolution du numérique est la troisième. Il y a eu le passage de l'état oral à l'état écrit, puis de l'état écrit à l'état imprimé, et de l'imprimé au numérique. Avec l'écriture, la notion de pédagogie est apparue. Avec l'invention de l'imprimerie, on a vu une flopée de traités de pédagogie, chez Montaigne, Rabelais, Erasme… Avec le numérique, la pédagogie est de nouveau en jeu. Pourquoi ? Pour des questions d'accès à l'information. Quand je rentre dans mon amphi, je me pose la question : quelle est la probabilité pour que mes étudiants aient déjà tapé sur Wikipedia le sujet de mon cours ? C'est ce que j'appelle «la présomption de compétence» dans mon livre. Avant, j'entrais avec la quasi-certitude que mes étudiants ne savaient rien de la discipline que j'allais leur enseigner : il y avait présomption d'incompétence.

Vincent Peillon : C'est un changement de civilisation dont l'école doit se saisir. Mais il ne faut pas sombrer dans une illusion techniciste. Nous devons savoir ce que nous voulons faire du numérique du point de