D'abord, ne pas se laisser distraire par la paresseuse hypothèse du fait divers, de l'accident peu signifiant, de la fatalité du mauvais endroit au mauvais moment ; ne pas se laisser aspirer par le sursignifié consumériste de la marque Fred Perry, duquel l'ancien combattu détournera pudiquement les yeux en soupirant que, de son temps… C'eût pu être au sortir d'un stade, au détour d'un concert de rap ou dans tout autre lieu public, mais c'est sur le trottoir d'une solderie que Clément Méric, étudiant, a croisé Esteban Murillo, agent de sécurité et son meurtrier présumé. Là s'arrête la rencontre pas tout à fait «fortuite» entre deux groupes de jeunes gens, les uns arborant ostensiblement et impunément, en tatouages sur leur peau et slogans sur leurs tee-shirts, les marqueurs d'une idéologie hors-la-loi, les autres y signifiant légalement leur opposition… (1)
Divers médias ont rapporté que les seconds auraient «chauffé», voire «provoqué» les premiers. Et déjà, dans ce lexique assimilant l'affaire à une altercation de terrain de foot, on perçut qu'il serait fait peu de cas de ce qui séparait les protagonistes. Même les sonorités jumelles de «fachos» et de «gauchos» confondaient ceux-ci et ceux-là, et de même la responsabilité induite des uns et des autres dans une commune culture de «la baston». Or, si les opinions des deux parties ne se «valent» pas, les façons de les exprimer - en l'occurrence, avec les mots ou avec