Nous refusons de donner aux enfants une éducation sentimentale à l’école, en dépit des désastres qu’une telle carence produira dans leur existence. Des suicides, des dépressions profondes, des meurtres, des accidents irréversibles. Mais aussi des relations pauvres, des souffrances morales longues et pénibles, des processus d’exclusion sociale, ou des vies tristes qui seront le prix à payer pour leur ignorance.
Nous faisons comme si l’amour, tout ce qui le précède et qui le suit, ne méritait pas un enseignement formalisé et autonome. Nous nous plaisons à imaginer que c’est facile, évident. Qu’il suffit d’avoir grandi dans une famille, d’avoir des amis, d’écouter des chansons, d’aller au ciné, de regarder la télé ou de lire des romans pour que les cœurs et les esprits soient prêts pour cette expérience si fondamentale. Personne ne met en garde les enfants contre les passions trop enflammées, contre la déception, les dangers des chagrins d’amour.
On ne leur donne pas les moyens les plus sages et les plus pratiques pour faire souffrir les autres le moins possible. On n’essaye pas de leur apprendre les meilleures techniques pour qu’un amour dure, pour bien choisir un partenaire, entretenir des liens susceptibles de leur permettre de s’épanouir ensemble. Il faut souvent toute une vie d’erreurs et de souffrance pour le comprendre. Ceci pourrait expliquer que tant de personnes vivent leur première aventure amoureuse réussie après 70 ans, alors que le temps qui leur reste se raccourcit