«Des durs, des vrais, des tatoués», dit la chanson. Les voilà, ces marlous, ces hommes en rupture qui livrent leur vie à fleur de peau. Des légionnaires dont la légende siffle toujours qu'ils sont des hommes «sans nom» parce que l'institution, où ils entrent comme dans un ordre, leur offre la possibilité de changer d'identité à leur convenance, en même temps qu'ils coiffent le képi blanc.
Sans nom, mais pas sans passé, pas sans souvenirs, pas sans histoires. Tous ces types semblent sortis tout droit des romans de Mac Orlan - lui-même ancien légionnaire au temps des sables coloniaux, des escarmouches contre lesrezzous, et auteur d'un petit livre à leur gloire. Au moment de tourner la page, ils en ouvrent souvent une autre. Sur leurs corps, pour ne pas tout oublier, pour garder des traces de leur vie d'avant. «Un homme, un tatouage, une histoire et un regard, résume, lapidaire, le photographe Victor Ferreira, qui fut durant vingt-trois ans un de leurs compagnons d'armes. Même quand je les prends de dos, leur regard me parle.»
«Sans pose, sans artifice»
Ancien adjudant-chef de la Légion étrangère, engagé à 21 ans à peine, Victor Ferreira a photographié pendant plus de deux ans et demi près de 250 légionnaires «sur leurs lieux de travail», dans leur unité, au retour d'une manœuvre, lors du nettoyage des armes, dans des moments de pause. De ce projet de longue haleine, il a tiré une série de portraits qui fera l'objet d'un livre à paraître en octobre aux Editions de l'Offi