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TRIBUNE

Don Quichotte au Club Med

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par Eric Vartzbed, Psychanalyste
publié le 16 juillet 2013 à 19h06

Dans le Larousse médical de 1924, on peut lire : «Les voyages, en distrayant l'esprit et le détournant de tout travail, sont excellents pour les individus ayant une grande fatigue intellectuelle, confinant à la neurasthénie.» Dans cette optique, les voyages sont vus comme un remède, un viatique. Mais est-ce toujours le cas ?

Ce n'est pas mon expérience. Quelques mauvais souvenirs ont eu raison de ma bonne volonté. Tout d'abord, entre le moment où je quitte le confort de ma maison et celui où je m'habitue à mon lieu de villégiature, je me sens vulnérable, sur la défensive, en danger. En exagérant à peine, je ressemble à ces crustacés sans coquille, à une sorte de bernard-l'hermite en transit entre deux abris, exposé aux agressions. Ensuite, le tourisme de masse (y en a-t-il un autre ?) m'indispose. Le fait d'être traité comme du bétail dans les aéroports, l'inconfort rencontré à l'étranger (je n'ai pas les moyens de voyager dans le luxe) m'ont guéri du prétendu «remède» par le voyage. De ce point de vue, je me sens plus proche de Baudelaire qui notait : «Cette vie est un hôpital où chaque malade est possédé du désir de changer de lit. Celui-ci voudrait souffrir en face du poêle, et celui-là croit qu'il guérirait à côté de la fenêtre.» Bref, le voyageur est travaillé par l'envie d'un changement salutaire qui n'est pas toujours au rendez-vous.

Dans Le voyage était presque parfait, l'anthropologue Jean-Didier Urbain s'est intéressé à ceux que le