A l'époque, on envoyait au mitard pour «délit flagrant d'homosexualité». Les rapports officiels disaient «automutilations» pour suicides. Et comme on ne pouvait tout de même pas punir la tentative de mettre fin à sa vie, on sanctionnait pour le drap déchiré. Dans son livre Intolérable, paru en mai, l'historien et directeur de recherche à l'EHESS Philippe Artières a réuni les textes publiés par le Groupe d'information sur les prisons, le GIP, au tout début des années 70 (1). Fondé par Michel Foucault, Jean-Marie Domenach et Pierre Vidal-Naquet, le GIP donne la parole aux détenus de droit commun, via des questionnaires et des cahiers de revendications qui circulent en prison avant d'être médiatisés par le groupe: en 1971 et 1972, le GIP publiera cinq brochures.
Réuni dans le livre de Philippe Artières, ce matériau offre un témoignage précieux de la prison de l'époque. «Camarades, écrit ce détenu de Loos, en 1972, je vous écris pour vous informer au sujet des tôles. Cela fait plusieurs fois que j'y plonge (quatre fois exatement). (...) J'ai entamé une grève de la faim pour que nous ayons le chauffage, on m'a mis huit jours au mitard. J'ai de ce fait voulu écrire à cette pourriture de Pleven et on m'a mis à l'isolement. J'ai voulu écrire à mon avocat, on m'a saisi la lettre. De colère, j'ai mis un coup de poing sur la gueule du directeur, alors là ça a été ma fête.»
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