Les débats récurrents sur le foulard islamique tournent toujours autour de la même question : la liberté républicaine exige-t-elle de le tolérer ou de l’interdire ? Pour apporter quelques éléments de réponse encore faut-il préciser ce que recouvre l’expression «liberté républicaine». Il ne fait guère de doute qu’elle est, historiquement et conceptuellement, caractérisée par deux traits centraux : l’autonomie individuelle et l’émancipation de l’oppression religieuse. La situation française ne peut évidemment être analysée sans référence au principe de laïcité dont les diverses interprétations ont fortement tendance à obscurcir le débat.
On oublie souvent que dans notre pays la laïcisation s'est accomplie, dès le début du processus, dans un contexte de pluralisme religieux. En dépit de la révocation de l'Edit de Nantes, protestantisme et judaïsme ont pu coexister avec la religion majoritaire. L'Edit de tolérance en 1787 reconnaît l'existence de sujets non-catholiques, si bien que la France est l'un des premiers pays d'Europe à dissocier appartenance nationale et appartenance religieuse. Si cette histoire est souvent négligée, c'est sans doute parce que, des trois acceptions différentes de la laïcité, les débats contemporains ont tendance à se focaliser sur la «laïcité d'émancipation», celle qui promeut la liberté de penser, celle de croire et surtout celle de ne pas croire. Dans ce sens, l'Etat apparaît comme le protecteur ultime face aux emprises communautaires, tout particuli