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Libération

Un enfant, ça n’a pas de prix ?

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publié le 13 septembre 2013 à 22h02
(mis à jour le 15 septembre 2013 à 16h21)

Dix mille euros. C'est la somme que demandaient à leurs clients les membres d'un réseau de vente de bébés roms, que la police marseillaise vient de démanteler. La réprobation est unanime. Et pourtant, la question mérite d'être posée : pourquoi, après tout, ne pourrait-on pas, dans une société acquise aux principes du libéralisme, faire commerce d'enfants ? Un début de réponse est peut-être à chercher du côté des anthropologues. L'un des plus éminents d'entre eux, Maurice Godelier, a mis en évidence l'existence, dans toute société humaine, de trois catégories bien distinctes d'objets (1) : ceux que l'on peut vendre, les marchandises (ce vieux vélo que vous mettez aux enchères sur eBay) ; ceux que l'on peut donner (ces tomates du jardin offertes à un voisin) ; enfin, ceux qu'il faut impérativement conserver, les objets sacrés (cette bague qu'on se transmet de génération en génération dans votre famille et qu'il serait sacrilège aussi bien de revendre à un joaillier que de donner à un ami).

Dans cette tripartition universelle des objets, où situer les enfants ? A l’évidence, c’est en objets inaliénables, c’est-à-dire en choses sacrées, que nous les envisageons spontanément. Et c’est précisément pour avoir cru pouvoir les traiter d’une autre manière que les membres du réseau marseillais se retrouvent aujourd’hui sous les verrous.

Leur méfait prouve ce