Il est écœuré de voir son travail détourné de son but initial. Michaël Guet travaille au Conseil de l’Europe, auprès du représentant spécial du secrétaire général en charge des questions relatives aux Roms. Depuis cinq ans, il collecte des données chiffrées sur ce peuple, pays par pays. Mais se désole aujourd’hui de la tournure des débats en France, et de la façon dont ses estimations chiffrées sont utilisées.
Manuel Valls, le ministre de l’Intérieur, assure que seule une minorité de familles roms souhaitent s’intégrer. Est-ce exact ? Dispose-t-on de chiffres ?
Le ministre fait référence aux projets d'insertion qui concernent, en effet, peu de familles. Il oublie de dire une chose : souvent, le temps que soient menés les diagnostics sociaux pour identifier les familles souhaitant s'intégrer, le camp est évacué, les familles dispersées à droite, à gauche et elles n'en profitent pas. Mais ce n'est pas parce qu'elles refusent de s'intégrer.
Le gouvernement a recensé 16 949 personnes vivant dans des campements illicites cet été, en grande majorité des Roms. C’est un chiffre précis. Est-il fiable ?
Ce chiffre correspond à peu près à nos estimations concernant les Roms vivant dans les bidonvilles. Mais il y a tous les autres. Les invisibles, ceux dont personne ne parle car on ne sait même pas qu'ils existent. Ces Roms, avocats, médecins, chefs d'entreprise préférant cacher leurs origines de peur de perdre des clients ou d'être stigmatisés. On ne connaît pas leur nombre, ni même une quelconque estimation. A vrai dire, il n'y a aucune raison qu'on