Onze bornes et quatre portiques de collecte de l'écotaxe détruits, la grille d'une sous-préfecture défoncée, des gendarmes visés par des projectiles, des bagarres… Plus de trois mois de colère bretonne et seulement cinq convocations devant le tribunal. Pas question de dire qu'il faut mettre les Bretons au trou, mais la rareté des poursuites pénales concernant des «bonnets rouges», comparée à la répression qui frappe le plus souvent les syndicalistes ouvriers, est flagrante. Les bonnets rouges bénéficient-ils d'une impunité choquante ?
«On peut appeler ça la criminalisation différentielle des mouvements sociaux, explique Jérôme Pélisse, sociologue et coauteur de La lutte continue ? Les conflits du travail dans la France contemporaine (Le Croquant, 2008). C'est une tradition en France : les agriculteurs qui dégradent des locaux de l'Etat bénéficient d'une réponse judiciaire plus rare et plus tolérante que les syndicalistes ouvriers, comme les Conti de Compiègne en 2009, ou plus récemment les Goodyear. Il faut se rappeler que le bureau de Dominique Voynet, alors ministre de l'Ecologie, avait été ravagé par des agriculteurs en 1999. Rien ne s'est