Faut-il pénaliser le client ? Alors que la question va bientôt animer les débats parlementaires (lire ci-contre), Libération donne la parole aux prostituées. Ce sont encore elles qui connaissent le mieux ces hommes qui hantent leur quotidien la plupart du temps. Des passes bon marché du boulevard Ney (XVIIIe arrondissement de Paris) aux palaces de l'escorting de luxe, toutes dressent un tableau sombre et glaçant de leur métier. Pour autant, beaucoup de ces femmes jugent la proposition de loi socialiste «à côté de la plaque». Elles reviennent ici sur leurs conditions de travail et expliquent leurs craintes et leurs attentes concernant la législation. Qui veut les protéger se doit d'abord de les écouter.
«L’amende va calmer les clients»
Rosen, vingt-deux ans de prostitution
Rosen a la cinquantaine. Elle a arrêté le métier en 2009 et se décrit comme une «survivante». Quand elle évoque ses anciens clients, aucun profil type ne se dégage : âgés de 20 à 90 ans, 85% d'entre eux sont mariés ou en couple. Elle ne compte plus les représentants, conférenciers, médecins, inspecteurs des impôts, hommes politiques (de droite comme de gauche), maçons, éboueurs qui ont utilisé ses services…
Les moins fortunés économisaient chaque mois pour payer la passe, de 80 à 100 euros. «On ne choisit pas ses clients, c'est l'argent qui choisit pour nous, prévient-elle. Beaucoup ont des besoins sexuels très hards, ils viennent pour assouvir leurs perversions. Je n'ai pas rencontré de misère sexuelle, mais des fétich