Frédéric Ocqueteau est directeur de recherche au CNRS-Cesdip. Il est notamment l'auteur de la Sécurité privée (1).
Manuel Valls a annoncé un projet de loi pour 2014 pour renforcer le rôle des acteurs de sécurité privée. Faut-il craindre une privatisation de la police ?
Pendant longtemps, l’Etat était plutôt dans la défiance à l’égard de la sécurité privée, vécue comme une menace pour les libertés publiques. Aujourd’hui, la demande de protection des personnes et des biens est devenue tellement importante, les technologies qui y répondent se sont tellement étendues, les prestataires de services sont tellement présents, que cela oblige l’Etat à réorganiser les forces en présence.
On ne parle d’ailleurs pas vraiment de privatisation, mais de complémentarité entre la police et la gendarmerie nationales et d’autres forces, comme les polices municipales et les entreprises de protection privée. Sans qu’il y ait réellement une stratégie délibérée de privatisation. C’est plutôt une privatisation rampante.
Est-ce le manque de moyens de l’Etat qui est à l’origine de ce recours croissant au privé ?
C’est indéniable. Mais cela correspond à la fois à un problème financier et une demande exponentielle de sécurité. Les pouvoirs publics affichent toujours le monopole de la sécurité. Mais en fait, on s’appuie de plus en plus sur les ressources du privé. Par exemple, sur les professions exposées, comme les bijoutiers, les buralistes ou les convoyeurs de fonds, il est évident que l’Etat n’a pas les moyens d’assurer leur protection, alors on les incite à faire appel à des protections privées, à de la vidéosurveillance, etc.
Y a-t-il une différence d’approche entre la droite et la gauche sur ce sujet ?
La différence ne se voit plus du tout. Pendant longtemps, le clivage droite-gauche en matière de sécurité se fa