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Libération
EDITORIAL

Inégalité

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publié le 26 novembre 2013 à 22h06

«Posons d'abord que le corps humain n'est pas à vendre et soyons pragmatiques ensuite», comme le dit la philosophe Sylviane Agacinski, qui défend la proposition de loi sur la pénalisation des clients de prostituées.

On pourra objecter que le droit et la morale ne font pas nécessairement bon ménage. Libertins et libertaires ont beau jeu de défendre le droit d’adultes consentants à faire usage de leur corps. Les désirs et la vie privée n’appartiennent pas aux législateurs et aux professeurs de droit.

Mais, s'agit-il réellement de l'intime lorsque l'on sait que l'immense majorité des prostituées sont des étrangères sans papiers, victimes de passeurs et maquereaux ? Qui peut encore fantasmer sur la liberté de la femme de vendre sa peau comme le romantise le film d'Ozon Jeune & jolie ? Quoi qu'en disent les défenseurs les plus éclairés des amours tarifés, y compris mâles, cette profession est essentiellement féminine ; et cette inégalité construit et renforce l'inégalité entre les sexes. Plus sérieuses sont les objections des associations qui défendent les prostituées et des prostituées elles-mêmes, pour qui toute loi répressive ne fait qu'accroître l'isolement des «travailleuses du sexe» et la dangerosité de leur activité. L'Etat doit-il, pour autant, laisser faire et valider cette forme d'exploitation ? On peut, bien sûr, ricaner à l'idée de réformer et éduquer les clients comme les chauffards et les alcooliques. Cette loi n'abolira pas la prostitution mais,