Pour médiatique qu'elle soit, l'affaire Dieudonné pose l'une des questions les plus anciennes à laquelle la jurisprudence administrative ait eu à répondre. Une question de proportionnalité. A quel moment doit-on restreindre des libertés essentielles à la démocratie - celle de se réunir (l'article 1 de la loi du 30 juin 1881 stipule : «Les réunions publiques sont libres») et celle de s'exprimer publiquement - pour garantir la sécurité et la paix publique (le code de sécurité intérieur fait des maires et des préfets les garants de «l'ordre public») ? Quand les mots deviennent-ils un «trouble sérieux à l'ordre public» ?
«Vous l'avez compris, c'est le mot "sérieux" qui est important dans cette phrase», prévient Anne Baux, présidente de l'Union syndicale des magistrats administratifs. Car c'est à la justice administrative, et non à la justice pénale dont on parle plus souvent dans la presse, qu'il revient de trancher cette question. La justice pénale est chargée de juger les infractions commises (c'est elle qui dira par exemple si les propos antisémites de Dieudonné à l'encontre de Patrick Cohen constituent un délit d'incitation à la haine raciale). La justice administrative, elle, tranche les différends entre des particuliers et l'Etat. Elle est notamment chargée de contrôler les act