A chacune son féminisme ? De grands sujets de société traversent, secouent et finalement fracturent ce mouvement. Confrontations autour de trois grands thèmes.
Peut-on être féministe et défendre le port du voile ?
La question a émergé en France au début de la décennie 2000 lors des premiers débats sur le voile à l'école. Soudain, des jeunes filles françaises revendiquaient le droit de porter le foulard islamique. Revendication déstabilisante pour le mouvement féministe français : les religions, historiquement, n'ont pas vraiment été les meilleures amies de la cause des femmes. La fracture a été immédiate. Evidente. Elle est encore présente aujourd'hui. Lors de l'affaire Baby Loup, par exemple, c'est au nom «des valeurs féministes», qu'Elisabeth Badinter a soutenu la directrice de la crèche de Chanteloup-les-Vignes contre sa salariée voilée. Pour Anne-Cécile Mailfert, porte-parole d'Osez le féminisme, les revendications pro voile «ne correspondent pas à (notre) définition du féminisme et de la liberté. Car le voile reste un symbole d'oppression faite aux femmes, une manière de différencier les hommes et les femmes».
Pourtant, selon la sociologue et anthropologue Nacira Guénif-Souilamas (auteur notamment de Les féministes et le garçon arabe),