On s'en fait toute une idée, mais Big Brother se révèle un peu décevant. La salle est enterrée à 10 mètres sous terre, recouverte de deux murs d'enceinte en béton, épais de 50 centimètres. On dit qu'elle doit résister à un crash d'avion. A l'intérieur, vingt armoires, type vestiaire de foot aux parois grillagées : des baies d'hébergement qui abritent des serveurs informatiques d'où dégueulent quelques câbles rouges, bleus, gris ou jaunes. «C'est ici que toutes les données interceptées sont rendues exploitables : la voix des conversations téléphoniques, les fax, les captures d'écran des pages Facebook consultées sur Internet, les mails…» explique Richard Dubant, le magistrat chargé du projet de la «plateforme nationale des interceptions judiciaires», la Pnij, qui devrait être lancée en avril. Et si le ministère de la Justice ouvre si grand les portes du «bunker»aux journalistes ces dernières semaines, c'est que la décision de concentrer tant de pouvoir aux mains d'une seule entreprise privée est contestée (lire ci-contre).
Sa conception, sa maintenance et son hébergement ont été confiés en 2010 par l’ancien président Nicolas Sarkozy et sa ministre de la Justice Rachida Dati au seul groupe de défense Thales : l’entreprise privée (dont l’Etat détient 26% du capital) deviendra bientôt l’unique acteur du marché des «interceptions judiciaires» : écoutes téléphoniques, interceptions de mails, SMS, fadettes,vidéos, fax, géolocalisation, coordonnées bancaire