Mon confrère Luc Le Vaillant se lamentait dans ces colonnes de son sort de Parisien exilé, «décapitalisé» selon son terme (Libération du 25 mars). Les prix du logement l'ayant poussé vers Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), le voilà contraint de passer tous les jours, à pied, sous le boulevard périphérique, dans une zone hérissée de travaux, un délaissé urbain absolu qui n'est certes pas la promenade la plus riante de Paris.

Or, sous les crasseux piliers de béton, il a une révélation. Lui apparaît le paradoxe du banlieusard : cet affreux endroit est bien un territoire parisien mais ceux qui le subissent, ce ne sont pas les habitants de la capitale. Ce sont les autres, ceux qui rentrent chez eux. Piéton de Paris quand même, les municipales lui servent de déclencheur de conscience : il a beau travailler dans cette ville, avoir un avis légitime sur l’état de ses frontières, lui, l’exilé n’a aucune prise sur ce qui fait son paysage et son trajet. Pas pour toi, mon ami : il faut dormir de l’autre côté de la ligne pour avoir voix au chapitre. Enfermé à Issy-les-Moulineaux, tu ne peux que voter pour une opposition éternellement perdante dans le fief d’André Santini, accroché en mairie depuis trente-quatre ans. Bon courage. Sur Paris, personne ne te demande ton avis. Tu es bien dépité. Et tu as bien raison.

Mais les voies de t