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Libération
Reportage

«Les femmes trinquent en silence» dans les quartiers

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La précarité touche de manière croissante les habitantes des zones sensibles, comme en témoigne à Créteil l’Association d’animation Saint-Michel.
Dans le quartier Mont-Mesly, à Créteil (Val-de-Marne), Najia, qui touche une pension d'invalidité, et Mounia, mère célibataire de quatre enfants. (Photo Louise Oligny)
publié le 21 avril 2014 à 19h36

Il y a cette maman burkinabée qui ne sort jamais sans son fils de 9 ans, «son protecteur», car il parle le français et pas elle. Il y a cette étudiante joviale, titulaire d'une licence d'histoire-géo, qui affirme avoir envoyé 332 curriculum vitæ le mois dernier pour 17 réponses, toutes négatives. Il y a cette Iranienne, journaliste reconnue dans son pays, contrainte à l'exil, et allocataire du revenu de solidarité active (RSA) depuis trois ans. Il y a cette «femme de ménage», le terme ne la «dérange pas», qui traverse l'agglomération parisienne d'est en ouest trois fois par semaine pour deux heures de ménage à 8 euros net. Enfin, il y a cette petite dame marocaine, analphabète et triste, qui n'a pas ouvert son courrier pendant plus de six mois parce que «l'administration française [lui] fait vraiment très peur».

Un jour, toutes ces femmes ont poussé la porte de l'Association d'animation Saint-Michel (AASM). Par désespoir, peur d'une expulsion, envie de rompre avec la solitude aussi. Parce qu'il n'y avait plus que ça à faire pour ne pas sombrer, tout simplement. Située en plein cœur du Mont-Mesly, l'un des ensembles les plus défavorisés de Créteil (Val-de-Marne), ce collectif a été fondé en 2000 par Jeannette et son mari. Cette octogénaire pétillante, originaire du Calvados mais résidant à Créteil depuis 1958, a toujours eu «beaucoup d'empathie pour les femmes des quartiers populaires».