Ces temps-ci, de gros grains s’abattent souvent sur le square Edouard-Vaillant. Aux premières gouttes, le groupe de Syriens s’évanouit soudain. Trois gamins se planquent sous un parapluie, des familles fondent sous une bâche détrempée, s’abritent dans des voitures. Et puis tous reviennent, inlassablement, chaque matin, à chaque éclaircie. Ce jardin de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), entre un hôtel Formule 1 et le périphérique, 202 réfugiés syriens en ont fait leur refuge, leur point de chute, malgré les averses et la décision de la mairie (divers droite) de cadenasser la grille il y a dix jours.
Les enfants jouent dans la rue, courent entre les voitures avec de faux pistolets bricolés, des femmes distribuent des assiettes de couscous offert par un couple d'Algériens. L'une, enceinte de huit mois et demi, tente de s'étendre sur le trottoir tandis que son fils Khalid répète des mots entendus en français dans un sourire de dents de lait : «bonjour», «merci». Plus loin sur un parking, les hommes fument et forment un attroupement autour d'une responsable de Revivre, petite association qui aide les réfugiés syriens. Ils l'interrogent sur la demande d'asile, les papiers à fournir, lui demandent pourquoi ça coince pour celui-là qui a déjà effectué cette requête dans un autre pays européen, pourquoi la préfecture prend le passeport syrien. Comment fait-on sans papiers ? Tout est compliqué dans une autre langue, au bout d'un ou deux ans d'exil.
Le dispositif mis en place spéci