René Marratier, 62 ans, maire UMP de la petite commune vendéenne de la Faute-sur-Mer de 1989 à 2014, aimait toujours conclure les courriers qu'il adressait à ses administrés d'une courte citation, maxime ou pensée. Le choix était large, de Nelson Mandela à Molière : «Et le chemin est long du projet à la chose.» Dans ces harangues, où il fustigeait par exemple le refus du préfet de renouveler une autorisation d'occupation du domaine public maritime, le style était soutenu, le vocabulaire choisi.
Benêt. Mais, à la barre du tribunal correctionnel des Sables-d'Olonne, c'est un autre homme qui se présente depuis trois semaines. Voix pâteuse, phrases frustes et bafouillées, l'ancien maire poursuivi pour homicides involontaires semble métamorphosé. La justice lui reproche sa politique frénétique d'urbanisation dans une zone à fort risque d'inondation. Vingt-neuf personnes sont mortes noyées à cet endroit-là, dans la nuit du 28 février 2010, après le passage de la tempête Xynthia.
Lundi après-midi débutait son interrogatoire formel, devant une salle pleine à craquer. A peine levé, le président du tribunal le sermonne, lui joue le benêt. «Je n'aurais jamais pu imaginer, à mon humble niveau…» Le président liste les «manquements» de l'élu : pas de plan de prévention des risques d'inondation, pas de plan d'organisation des secours, pas de distribution aux habitants des plaquettes d'information… Sans compter l'octroi de permi