Outre les drapeaux en berne et le va-et-vient des patrouilles de police, les établissements scolaires du IIIe arrondissement de Paris tentent de faire de ce jeudi une journée presque normale. Un jour après le terrible attentat, perpétré dans les locaux de Charlie Hebdo, qui a coûté la vie à 12 personnes et blessé 11 autres, l'atmosphère oscille entre angoisse et mobilisation dans les écoles. «J'ai peur depuis hier. Après ce qu'il s'est passé, je ne me sens clairement pas en sécurité. Et pour tout dire, j'avais de l'appréhension en allant au lycée ce matin. Je ne me sens pas protégée, la présence des flics n'y change rien», confie Kaouche, 19 ans, en tirant anxieusement quelques bouffées sur sa cigarette.
A ce moment même, une voiture de police passe dans la rue de Turbigo, gyrophares allumés. Le niveau «alerte attentat» du plan Vigipirate a été décrété mercredi par Manuel Valls. Au total, 1 300 membres des forces de sécurité sont déployés en région parisienne. Une présence toute particulière dans le quartier où se sont déroulés les faits. «On a expliqué aux élèves de ne pas rester devant l'école en sortant, de partir vite pour éviter les regroupements. On ne sait jamais», déclare Patrick Stumpf, conseiller principal d'éducation à l'école élémentaire Béranger.
Les établissements scolaires ont reçu, ce matin, une note du rectorat les invitant à rester vigilants. Mais loin de céder à la psychose, certains parents souhaitent maintenir un semblant de normalité pour ne pas angoisser les enfants. A l'instar de Julien, papa de la petite Tonie, 7 ans. Devant les grandes portes vertes de l'école Saint-Sébastien, le père fait un dernier bisou à la fillette avant de la laisser rentrer. «Je fais tout pour la préserver de ça, confesse-t-il. Elle a le temps de découvrir que le monde est vilain.» Et d'ajouter: «Ce matin, ils en parlaient à la radio. C'est bête mais j'ai préféré lui mettre des chansons.» Pourtant, Tonie ne pouvait ignorer ce qui s'est produit.
Des pancartes de soutien
A midi, l’école a observé une minute de silence en mémoire de ceux qui sont morts en exerçant leur métier. Une mesure décrétée par François Hollande, dans le cadre de la journée de deuil nationale, dans tous les établissements scolaires, services publics, transports en commun. Les métros et bus étaient à l’arrêt après qu’une annonce a été faite. «Je n’étais pas encore au lycée, j’étais dans le métro. La plupart des gens ont respecté cette minute de silence. Moi aussi. C’était important en tant que citoyen», raconte Vincent, 21 ans, en classe prépa expertise comptable au lycée Turgot. Kaouche, elle était en cours: «On s’est arrêté à midi en pleine interro. Ce qui s’est passé à Charlie Hebdo nous concerne tous. C’est la liberté d’expression qui est en jeu. Une des plus grandes valeurs de la République, on nous l’a rappelé.»