Mercredi matin, quand j'ai appris la tuerie, c'est à Philippe Val que j'ai téléphoné. D'emblée, il m'a dit : «Il faut serrer les rangs, ne pas désarmer et faire paraître immédiatement un numéro de Charlie.»C'est ce qu'auraient voulu Charb, Cabu et les autres. Oui, bien sûr, mais ça ne suffit pas. Ce combat des Lumières, qui a été pendant tant d'années celui de Charlie, je voudrais bien qu'il soit un exemple pour demain et que l'on cesse enfin dans ce pays - celui de la Révolution, de Victor Hugo et de la Résistance - de porter au pinacle, fût-ce en prétendant les critiquer, toutes sortes d'ouvrages abjects et dénués de talent qui, dans la plus pure tradition du nihilisme, du décadentisme et de la haine des élites, s'en prennent aux femmes, aux homosexuels, aux Arabes, aux juifs, à la pensée, à l'intelligence, à la raison. Apologie du régime de Vichy, appel à la déportation des étrangers par crainte d'un «grand remplacement», ou encore revendication masochiste d'une soumission stupide, jugée plus utile que la liberté, l'engagement ou la rébellion, voilà ce que dénonçait magnifiquement Charlie, en se moquant sans cesse, et sous toutes ses formes, du «roi des cons», de sa galette et de son gros nez.
Voilà ce dont il faut hériter aujourd’hui.