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DROIT DE SUITE

Valls «sous influence juive»: ni Dumas ni Bourdin ne regrettent

Interrogé sur France 24, l'ancien ministre assume ce qu'il a dit, sans le redire. Jean-Jacques Bourdin, lui, dit avoir fait son «métier».
Roland Dumas sur le plateau de France 24, lundi 16 février, après ses propos sur l'«influence juive» de Manuel Valls. (Capture d'écran)
publié le 16 février 2015 à 18h22

«Comme disent les Suisses, j'ai mis le feu au lac» : difficile de ne pas déceler chez Roland Dumas, ce lundi après-midi sur France 24, un semblant de satisfaction. Son «probablement», répondu le matin même à Jean-Jacques Bourdin qui lui demandait sur BFM TV si Manuel Valls est «sous influence juive», a suscité un tollé.

On aurait été étonné du contraire : à 92 ans, l'ancien ministre des Affaires étragères de François Mitterrand ne regrette rien, et surtout pas ce qui s'est produit quelques heures plus tôt. D'abord, rappelle-t-il, «l'expression était dans la question» de Bourdin, il n'a fait que répondre par l'affirmative. Bon, dans sa tête, la question s'est au passage transformée en «est-ce que Manuel Valls subit l'influence du gouvernement israélien ?» Le présentateur de France 24, Sylvain Attal, lui rappelle donc que la question était «Manuel Valls est-il sous influence juive ?»

Oui, enfin, «je pense que nous sommes dans un régime de libertés», enchaîne Dumas, rappelant que «beaucoup de gens se sont mobilisés pour dire qu'on a le droit de dire ceci, on a le droit de dire cela. Eh bien moi, je le dis.» Quoi ? En fait, il ne le redit pas.

Mais à ceux qui l'accusent d'antisémitisme, il rétorque : «Vous voyez de l'antisémitisme partout. Vous croyez que je suis le seul à penser et dire ce que je dis ? On me pose une question, si je réponds "bien sûr que non", personne ne me croira, et moi-même je ne me croirai pas

Mais au présentateur de France 24 qui lui demande si, tout de même, on peut être juif sans être inféodé à Israël, il répond : «Bien sûr !» Quant à ses liens avec l'extrême droite, attestés par des photos de lui en compagnie de Dieudonné, Alain Soral et Bruno Gollnisch : «Gollnisch, je ne le connais pas.» Et puis, sur ces photos : «Pourquoi vous remarquez toutes ces choses et pas d'autres ?»

«Faire dire à celui qui est en face de moi ce qu’il pense»

Quant à l'autre protagoniste de l'affaire, Jean-Jacques Bourdin, critiqué pour avoir lui-même mis dans la bouche de Roland Dumas l'expression «influence juive», il a réagi auprès du site Puremedias.com en défendant son «métier» : «Je l'ai poussé, je l'ai senti, je l'ai conduit. Je savais ses positions antérieures, mais je voulais qu'il le dise, qu'il se dévoile. Il n'est pas le seul à penser ça, d'autres le pensent aussi. Poser la question, ça ne veut pas dire que je le pense ! Mon rôle est de faire dire à celui qui est en face de moi ce qu'il pense.» Et de se montrer serein vis-à-vis du fait que le CSA a indiqué s'être emparé de la question.

En réponse à un tweet d'un élu UMP qui pointait le rôle de Jean-Jacques Bourdin dans les propos de Roland Dumas, l'intervieweur ayant selon lui «incité aux propos antisémites», le Conseil supérieur de l'audiovisuel a en effet indiqué sur Twitter qu'il «instrui[sai]t un dossier».

Contacté par Libération, le CSA s'est borné à préciser que le dossier serait instruit par le groupe de travail «Respect des droits et libertés» présidé par Nicolas About. Son rôle sera de déterminer dans quelle mesure Jean-Jacques Bourdin a ou n'a pas poussé Roland Dumas à tenir ses propos, et a ou n'a pas tenu son antenne une fois ceux-ci prononcés.