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Libération

SOS Homophobie : «Les lesbiennes doivent sortir de l’invisibilité»

Discrimination . SOS Homophobie a mené une enquête édifiante sur les violences liées à la lesbophobie.
Un «kiss-in» géant à Paris, en faveur du mariage pour tous, en novembre 2012. (Photo Bruno Charoy)
publié le 5 mars 2015 à 19h56

Refréner son envie d’embrasser sa compagne dans la rue. Redouter d’être surprise à la sortie d’un bar lesbien. Contrôler ses gestes, ses mots pour ne pas dévoiler son orientation sexuelle. Deux ans après le vote pour le mariage pour tous et alors que le mot «lesbophobie» est enfin entré dans le dictionnaire, pour les lesbiennes, le «vivons heureuses, vivons cachées» semble être toujours de mise.

Rejet. Par peur des «réactions hostiles», des violences qu'elles pourraient susciter, elles se rendent «invisibles» dans la société, constate SOS Homophobie dans une enquête rendue publique jeudi. Lancée en avril 2013, cette étude souhaite «montrer la réalité et la forme que prend la lesbophobie» en France et veut donner la paroles aux homosexuelles afin qu'elles parlent des violences dont elles sont victimes et qu'elles taisent trop souvent. «Elles contactent peu la ligne d'écoute de SOS Homophobie, expose Tania Lejbowicz, coréférente de la commission lesbophobie au sein de l'association. Sur les 3 517 témoignages que nous recevons chaque année, seulement 329 concernent des actes lesbophobes.»

Questionnaire sur Internet et dans les médias LGBT, présence de l'association lors d'événements communautaires comme l'Eurolesbopride… «Il a vraiment fallu aller chercher ces témoignages», explique Tania Lejbowicz. Sur les 7 126 répondantes, la plupart âgées de moins de 30 ans, 59% ont subi au moins un acte lesbophobe au cours des deux dernières années, dont 13% «régulièrement». Insultes, moqueries, refus de promotion, rejet familial, exclusion d'une équipe sportive, menaces jusqu'aux agressions physiques.

L'association a également voulu déterminer si le fait de vivre ouvertement son homosexualité était lié à la lesbophobie vécue. «Nous voulions voir si les femmes étaient victimes parce qu'elles étaient visibles ou si elles n'étaient plus visibles parce qu'elles avaient été victimes», explique Tania Lejbowicz.

«Contrer». Le verdict est sans appel : «Le risque d'être discriminée est plus grand quand on est visible», ce qui conduit à «des stratégies pour contrer les réactions hostiles». Quelque 18% ne manifestent jamais de signe d'affection à leur compagne en public et 21% ne se tiennent jamais la main dans la rue. «Il faut que les lesbiennes sortent de cette invisibilité, martèle Lejbowicz. Les pouvoirs publics doivent se donner les moyens judiciaires, financiers et humains pour mettre fin à ces inégalités et violences.»