«Episode dépressif», «crise d'angoisse», «traitement régulier»… Expressions fourre-tout. Au fil des jours, si quelques informations circulent autour de la santé mentale d'Andreas Lubitz, leur aspect parcellaire ne permet ni de comprendre ni d'expliquer le geste de ce jeune pilote.
Premier élément, il aurait stoppé pendant quelques mois son apprentissage de pilote. Des journaux allemands, dont Bild, ont évoqué «un épisode dépressif», d'autres «un burn-out». Et il faisait depuis l'objet d'un «suivi médical particulier et régulier». «Les documents retrouvés attestent d'une maladie existante et de traitements médicaux correspondants», a précisé le parquet, qui n'a pas révélé la nature de la maladie. «Que voulez-vous en déduire ? Ce n'est pas une dépression qui vous conduit à jeter un avion sur une montagne, lâche un psychiatre, agacé. Quant au traitement, ce ne sont pas des antidépresseurs qui peuvent conduire à pareil geste.»
Reste que les enquêteurs vont recueillir d’autres données bien plus utiles. Dans ces situations d’actes insensés, d’abord il s’agit de rassembler les informations médicales sur l’homme, et les avis des médecins qui l’ont suivi : ils sont aujourd’hui protégés par le secret médical et celui de l’instruction.
Lisse. Ensuite, les enquêteurs vont chercher des éléments dans sa vie qui peuvent laisser apparaître des ruptures. C'est ce que certains appellent des «événements sentinelles». Mais y en a-t-il ? Ont-ils été visibles ?
Derrière l'histoire apparemment lisse du jeune homme, derrière les propos anodins de ses proches ou amis qui ont été interrogés, se cachent des constructions psychiques beaucoup plus lourdes et inquiétantes. «La détermination qu'il semble avoir eue, pendant ces longues minutes où l'on cognait à la porte du cockpit, ne plaide pas pour un geste brutal, voire une sorte de raptus, qui disparaît aussi vite qu'il apparaît», suggère un psychanalyste. «A-t-il vécu quelque chose de traumatique ? Une vengeance ? Une identification au 11 Septembre ? En tout cas, il n'a pas fait écraser l'avion sur une ville,relève un autre praticien, expert devant les tribunaux. Il y a une froide détermination qui devient une froideur absolue.»
«Contexte». Le Dr Elie Winter, psychiatre et psychanalyste, s'interroge ainsi : «Il y a évidemment un contexte. S'est-il coupé du monde ? Y a-t-il eu des événements particuliers, les jours précédents ? Plein d'hypothèses peuvent exister, et coexister. On peut imaginer un accès mélancolique, mais cela ne suffit pas. L'explication est peut-être cachée depuis très longtemps.»
En même temps, le copilote de Germanwings semble avoir «élaboré» quelque chose. Le fait qu’il ait dissimulé différents arrêts de travail indique clairement qu’il voulait «voler».