Pour une opération qui se voulait exemplaire, c'est loupé. Depuis l'évacuation du campement de migrants de La Chapelle, à Paris, il y a dix jours, la situation ne fait que se dégrader. Ce jeudi, une centaine de migrants se sont retranchés plusieurs heures dans l'ancienne caserne de pompiers Château Landon, dans le X^e arrondissement, avec des militants. Ils ont déboulé en pleine distribution de nourriture à des sans-abri par l'Armée du salut, qui occupe désormais les lieux. Lors de l'arrivée des migrants, les CRS ont chargé, usé de leurs bombes lacrymogènes et tenté de forcer les portes, qui se sont fermées in extremis. «Ils sont fous, c'est sale, il y a même des rats», glisse un bénévole de l'Armée du Salut. Certaines portes du bâtiment sont rouillées, des vitres brisées, des planchers pourris.

Cinq conseillers de Paris et deux conseillers régionaux (Julien Bayou et Eric Coquerel) se trouvent à l'intérieur de la caserne. Le choix même du lieu a divisé les militants : NPA et autonomes étaient pour (l'idée venait d'eux), quand une élue PCF, affligée, estimait que «ce lieu est dangereux et insalubre. C'est irresponsable.» Mais «l'idée est de s'installer ici en attendant des propositions» d'hébergement, affirme Emmanuelle Becker, conseillère PCF de Paris, en assurant que les migrants resteront dans ces lieux «le temps qu'il faudra». La mairie de Paris déplore qu'il y ait dans la caserne «100 migrants pour 400 militants d'extrême gauche, ce n'est pas tolérable. On va intervenir, se coordonner avec la préfecture de police.» Elle déplorait déjà auparavant «l'attitude intolérable de certains militants et groupuscules» qui dissuaderaient les migrants de rejoindre des hébergements.

Des policiers encerclent la caserne et ont lancé plusieurs charges contre les personnes, essentiellement des militants, présentes dans la rue Philippe de Girard. La situation s'est ensuite calmée, une centaine de personnes attendent pacifiquement, certaines dansent au rythme d'une fanfare.

Des élus parisiens EELV, PC et PG sont dans la caserne pour négocier, aux côtés du directeur de cabinet d'Anne Hidalgo. La discussion aboutit à un accord pour 110 places d'hébergement, pour quelques nuits, sur trois lieux différents à Paris et à Nanterre. Si les migrants sont d'accord, les militants qui occupent la caserne ne sont pas unanimes. La tension est forte entre les élus parisiens et les militants d'extrême gauche.

Finalement, vers 23h30, deux bus arrivent pour emmener les migrants vers les lieux prévus.