Tous les moyens sont bons pour rembourser la dette d'un pays. C'est du moins ce que laisse entendre la plateforme de financement participatif immobilier Crowdimo Invest, dans sa nouvelle campagne de publicité diffusée lundi et mardi, dans les pages du Parisien/Aujourd'hui en France. On y voit François Hollande, solennel sur le parvis de la résidence présidentielle, tenir une pancarte : «A vendre palais de l'Elysée, investissement libre à partir de 1 euro.» Un «acte citoyen» sous forme d'investissement, pour renflouer les caisses de l'Etat.
L'encart explique : «Aujourd'hui l'Etat cède de très nombreux biens immobiliers afin de diminuer, d'une part, le budget de leur entretien et, d'autre part, pour rembourser la dette du pays.» Dans ce cas, pourquoi ne pas offrir aux Français la possibilité d'acheter quelques mètres carrés de l'Elysée, et d'avoir ainsi le président de la République pour locataire ? Pour acheter, c'est simple : il suffit de s'inscrire sur le site de la plateforme et d'y faire une proposition d'investissement. La quête a vite porté ses fruits : «Mardi matin, nous avions déjà recueilli pour 7 millions d'euros de promesses d'investissement sur notre site, et un particulier nous en a proposé le double», raconte à Libération Yoni Botbol, directeur général de Crowdimo Invest, qu'il a cofondé et lancé le 15 janvier.
«Proposer ces joyaux aux Français»
L'Elysée n'est bien évidemment pas à vendre. Le montage photo osé, fourni par l'agence Hémisphère Droit sans l'accord du principal concerné, est là «pour faire du bruit». La jeune équipe qui gère la plateforme immobilière n'a pas froid aux yeux. Tous les ans, l'Etat vend pour de bon des biens immobiliers, certains de prestige. Yoni Botbol prétend sans rire vouloir «rencontrer François Hollande», pour qu'il lui «permette de proposer ces joyaux aux Français, directement sur [son] site». Le jeune gestionnaire de 25 ans, tout juste sorti des bancs de l'université, promet de s'excuser directement auprès du Président, pour avoir utilisé son image à des fins publicitaires.
Le récent boom du crowdfunding (financement participatif) en France a vu de nombreuses start-up proposer ce système en ligne. Les internautes peuvent se regrouper et financer une opération immobilière à Paris ou en province, aider à la rénovation, voire acheter des biens en viager. Certains annoncent des rendements annuels réalistes de l'ordre de 4% à 5%. Mais d'autres vont jusqu'à faire miroiter du 12%. C'est dire que les investisseurs ont intérêt à être prudents avant d'engager leur argent. «C'est un modèle tout neuf, qui doit encore faire ses preuves, admet Yoni Botbol, mais c'est prometteur.»
Dans un souci de transparence, l'ensemble des cessions immobilières de l'Etat sont gérées par le service France Domaine, dépendant directement de Bercy. La Direction générale des finances publiques a estimé en juin 2014 que le parc immobilier de l'Etat s'élevait à près de 60 milliards d'euros. Le bâtiment du ministère de la Défense, boulevard Saint-Germain, pourrait lui-même être mis sur le marché en vue du déménagement de tous les services de la Défense au même endroit dans ce que l'on appelle déjà "le Pentagone à la française"' dans le XVe arrondissement.