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Libération
Reportage

A Mayotte, les dessous d’un recensement critiqué: «Si les migrants ont peur de donner leur identité, on met un faux nom»

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Migrants, réfugiés... face à l'exodedossier
En s’appuyant sur sa dernière enquête, l’Insee dénombre 310 000 habitants sur l’île, quand les élus locaux, eux, s’accordent autour de 400 000, affirmant que les migrants ne sont pas comptabilisés. Une différence notable qui pourrait avoir une incidence sur le calcul des dotations annuelles de l’Etat. Pour en avoir le cœur net, «Libé» a suivi les recenseurs dans les bidonvilles où vit la grande majorité des sans-papiers.
Le recenseur de la commune de Labattoir Kevine Ali Houssen, dans le bidonville de Polé, sur l’île de Petite-Terre (Mayotte), le 9 mars 2024. (Laurent Decloitre)
publié le 14 mars 2024 à 18h30

En métropole, il arrive qu’un maire conteste le recensement, estimant que l’Insee s’est trompé sur le nombre de ses habitants. «Mais à Mayotte, c’est toute une île qui nous critique», se désole Loup Wolff, le directeur régional de l’Insee. La raison ? L’institut comptabilise, en s’appuyant sur la dernière enquête de 2017, 310 000 habitants dans le département de l’océan Indien au 1er janvier 2023. Or, comme l’écrit la Cour des comptes dans un rapport publié en 2022, «la plupart des interlocuteurs s’accordent sur le chiffre de 350 000, voire 400 000 habitants».

Pour Mansour Kamardine, député LR, la population s’élèverait même à 450 000. L’élu en veut pour preuve les centaines de milliers de bouteilles d’eau distribuées quotidiennement lors de la pénurie de la fin d’année sur l’île. Et de donner d’autres arguments, comme le volume des connexions à Internet ou le nombre de naissances : plus de 10 000 chaque année, ce qui fait du centre hospitalier de Mamoudzou «la plus grande maternité de France». Certains vont jusqu’à se référer à la consommation de riz, base des repas à Mayotte, pour démontrer que l’Insee se trompe. Le