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Libération
«Mise en scène»

A Monaco, l’anniversaire très orchestré d’un prince Albert embarrassé

Ecoles fermées, soutien d’Emmanuel Macron : tout est planifié pour donner l’aperçu d’une ferveur populaire, alors que le Rocher est dans l’œil du cyclone médiatique et financier.
Albert II de Monaco, le 19 novembre au palais princier. (Valery Hache/AFP)
publié le 14 mars 2024 à 12h05

C’est officiellement une association citoyenne intitulée Objectif Monaco qui invite à célébrer les 66 ans d’Albert II de Monaco, ce jeudi 14 mars à midi sur la place du palais princier. En des termes endiablés : «Une manifestation publique, spontanée et festive, pour manifester au souverain l’attachement et l’affection de la population.» Avant de préciser le plus sérieusement du monde : «Attention, la discrétion est de mise pour garder au maximum l’effet de surprise.» Vaste plaisanterie, car les pouvoirs publics ont instauré la fermeture des bureaux et même des écoles pendant deux heures, pour qu’adultes et enfants se déplacent en masse.

Objectif Monaco précise tout de même le contexte, à savoir «une période médiatique chargée», la presse française et internationale multipliant ces dernières semaines les révélations sur les dessous financiers, immobiliers et judiciaires du Rocher, peu à l’honneur de la famille princière. Pierre-Olivier Sur, avocat de Claude Palmero qui fut plus de vingt ans le grand argentier des Grimaldi, évincé brutalement et qui vient de saisir la Cour européenne des droits de l’homme, dénonce une «mise en scène poutinienne conçue pour remettre en selle l’image du prince Albert».

Eplucher le système financier monégasque

La France, via son ambassadeur dans la principauté, Jean d’Haussonville, se mêle aux réjouissances avec une interview des plus élogieuses parue dans Monaco Matin. Le diplomate français y affirme «le plein soutien du président de la République au prince souverain, non seulement dans l’amitié de nos traités séculiers, mais aussi dans une relation d’estime personnelle et de confiance entre les deux chefs d’Etat». L’ambassadeur y annonce même une visite d’Etat d’Emmanuel Macron à Monaco en fin d’année, la première du genre depuis François Mitterrand en 1984.

Bref, embrassons-nous Folleville au moment ou Moneyval (qui dépend du Conseil de l’Europe) et le Groupe d’action financière (qui dépend de l’OCDE) sont en train d’éplucher le système financier monégasque, leur rapport final pouvant éventuellement conduire à placer le Rocher sur la liste grise des pays dits non coopératifs en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux. Jean d’Haussonville semble tempérer la problématique : «La vision qu’Emmanuel Macron à d’Albert II est celle d’un homme moderne, un homme de réforme notamment sur les enjeux de transparence financière.» Quand Objectif Monaco loue son «engagement pour un urbanisme durable.» On attendra quand même le rapport de Moneyval pour se faire une opinion.