Le colosse d’acier bleu et blanc étend ses 90 mètres le long du quai. Ce vendredi 16 avril, après quarante jours en mer, le Joseph-Roty II, monument d’histoire maritime et plus gros chalutier de France, vient de s’amarrer pour quatre jours à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), son port d’attache. Sur les quais, le rituel de l’escale se met en branle. Les camions-citernes se succèdent pour remplir les cuves de gasoil. Les mécanos se pressent au chevet du navire, pour les réparations d’usage. Une petite trappe dans la coque commence à libérer un à un, sur le tapis roulant déployé vers la rive en contrebas, les petits cartons renfermant la pâte de surimi élaborée dans les cales du chalutier usine, qui sera ensuite transformée en bâtonnets. Une grue a été acheminée en renfort, pour extraire aussi la cargaison par palettes, depuis le pont. C’est qu’il faut décharger le plus rapidement possible les 850 tonnes de merlan bleu ramassées pendant la campagne, refaire le plein de carburant, d’emballages et de nourriture, puis remettre le cap vers l’ouest de l’Irlande, à la poursuite du migrateur.
«Le poisson est là, il faut repartir au plus vite», lance Yohan Siméon, le responsable des quais. «Il a pondu, maintenant il est en pleine course, il remonte vers le nord. Arrivés aux îles Féroé, les bancs s’éclatent et on ne peut plus le pêcher. C’est la dernière marée avant l’été», dépeint le capitaine Frédéric Quiniou, juste avant d’embarquer pour prendre la relève de son homol