
Reportage
A Villeurbanne, un foyer pour permettre aux mineures prostituées de «redevenir des enfants»
«Mon proxénète, c’est ma meilleure amie qui me l’a présenté. Quand il m’a recrutée, elle s’est mise à pleurer et m’a dit : “Je suis désolée. Tu vas finir comme moi…” Je lui ai répondu : “C’est rien.” Mais plus tard, j’ai compris…» Sonia (1), 17 ans, en avait 16 quand elle a commencé à se prostituer. Elle raconte son histoire entre deux bouchées d’un repas servi par son éducatrice. C’est l’heure du déjeuner, à l’Ilot, ce jeudi hivernal. Assise à la grande table du réfectoire, en pyjama rose, Sonia, d’abord renfermée, se livre à présent sans retenue. «Il y a une période où je passais mes jours et mes nuits dans des hôtels ou des Airbnb, où la lumière était tout le temps éteinte. J’étais sous ballon [du protoxyde d’azote, ndlr] pour ne pas être consciente de ce qu’il se passait. Je pouvais faire dix, douze clients en une soirée.»
Quand son récit approche de l’horreur, elle se préserve en évoquant ce qu’ont subi d’autres jeunes femmes, comme si elle voulait s’effacer des scènes décrites : «J’ai vu des filles incapables de marcher après pl