Après quatre décennies passées en Suisse, Alda, 66 ans, et son mari Francisco, sont rentrés il y a quelques années à Sebadelhe, dans la vallée du Douro. La retraite bien entamée, ils œuvrent encore dans le vignoble familial de porto. La voix d’Alda est chaude. Elle parle de «réussite» et de «fierté».
«Tout le monde partait à l’époque, tout le monde. Beaucoup de Portugais ont émigré à cause de la dictature et de la guerre dans les anciennes colonies, en Afrique, mais il s’agissait des gens instruits. Dans mon village, je ne connais personne qui est parti pour cette raison. On fuyait plutôt la misère. Les gens prenaient la route clandestinement, voyageaient la nuit, mettaient une semaine pour rejoindre la France.
«Mes frères et ma sœur sont partis en Angola, une ancienne colonie portugaise, ou à Lisbonne. Moi, j’ai dû rester avec mes parents. J’ai commencé à travailler à 13 ans dans les champs. Francisco, lui, était maçon. Il faisait des travaux dans mon village, on s’est connus comme ça. On allait danser au bal, le dimanche, sur de la musique française que les premiers émigrés ramenaient de France.
«J’avais 21 ans quand nous sommes partis en Suisse. Je n’avais jamais quitté mon village. On a dû laisser notre première fille derrière nous. Elle avait 2 ans. Francisco raconte souvent ses premiers jours en Suisse, il était sur un chantier, il posait des pavés sur les bords du lac Léman. Il n’avait que ses habits d’ici. Avec la bise venue des Alpes, il n’a jamais eu aus