Dans le bus 255, Hada s’est installée dans le sens de la marche. «Ça peut faire tourner la tête, parfois, de regarder la route à l’envers. Je suis fatiguée, je n’ai pas besoin de ça.» Il n’est même pas midi, ce lundi d’octobre, mais Hada a déjà les genoux qui flanchent et la tête farcie d’une journée trop remplie. Ses yeux sont brillants comme ceux d’un oiseau de nuit. Femme de ménage de 57 ans, elle est levée depuis 5 heures du matin. Elle a pris le premier métro pour aller nettoyer des bureaux chics aux Invalides, à Paris. Puis enchaîné dans le Xe arrondissement, en milieu de matinée, pour faire briller les escaliers d’un immeuble de sept étages. Le 255 la ramène chez elle, à Saint-Denis. Hada est assise, enfin. «J’évite ce bus ces jours-ci parce qu’il a de gros retards, mais là, je n’avais pas d’autre choix. J’ai voulu prendre le RER D à la gare du Nord : tout était bloqué à cause d’un problème de signalisation. J’ai pensé attraper le 54, pour récupérer le métro, mais… Vingt-trois minutes d’attente. Alors j’ai marché une demi-heure jusqu’à Porte de Clignancourt.» Coup de chance, le bus était là.
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Hada, habit noir, collier de perles et chignon serré, sait déjà qu’elle aura au mieux deux heures de repos chez elle avant de repartir travailler jusqu’à tard le soir. Dans ce tourbillon déréglé qu’est devenu le réseau des transports en commun franciliens, elle s’est mise à tout calculer. «Mais j’évite de me focaliser sur le temps que je perds. Je préfère penser au