Etendue sur la tourbe du Lawa, affluent du fleuve Maroni qui fait office de frontière avec le Suriname et se jette dans l’Atlantique à 200 kilomètres en aval, Maripasoula semble en avoir pris le rythme et la langueur. Seules les carcasses carbonisées de voitures devant l’antenne locale de la collectivité territoriale de Guyane (CTG) laissent imaginer l’ampleur de la crise dont la commune sort à peine : des premiers jours d’octobre à la fin du mois de novembre, les 13 000 habitants de cette ville, la plus étendue de France, ont été quasiment coupés du littoral. Alors que l’Etat français est tenu à un impératif de continuité territoriale et d’égalité des territoires, les habitants de Maripasoula, déconnectés des réseaux routiers et d’électricité, se sentent laissés-pour-compte.
Tout débute le 3 octobre, lorsqu’une avarie des générateurs, insuffisants et vétustes, de la centrale thermique prive la ville d’électricité pendant trois jours. «Imaginez : pas de lumière, pas de ventilateur alors qu’il fait 40°C la nuit ; les arrière-cuisines envahies par l’odeur des viandes qui pourrissent dans les congélateurs ; des coupures d’eau ; le boulanger qui ne peut plus faire de pain… Et vous auriez voulu qu’on reste tranquilles ?» s’indigne Christopher (1), un jeune Boni, l’ethnie majoritaire des noirs-marrons, les descendants d’esclaves évadés des plantations.
Comme Christopher, plus d’une centaine de personnes, galvanisées par des groupes WhatsApp créés pour l’occasion, se regroupen