Elle avait pourtant été l’une des premières entreprises à adopter le Nutri-Score. Le géant agroalimentaire Danone a annoncé ce mercredi 4 septembre qu’elle ne l’afficherait plus sur ses yaourts à boire, désormais défavorablement notés. De quoi susciter de vives critiques de la part d’associations de défense des consommateurs.
Avec un code couleur simple, allant du vert au rouge, et des lettres de A à E, le Nutri-Score oriente le consommateur vers les produits meilleurs pour la santé et pousse les industriels à améliorer leurs recettes. En attendant un étiquetage harmonisé et obligatoire au niveau européen, les entreprises l’affichent sur la base du volontariat dans sept pays (Allemagne, Belgique, Espagne, France, Luxembourg, Pays-Bas et Suisse). D’autres, comme en Italie, y sont farouchement opposés.
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Danone revendique d’avoir été «pionnier en France», utilisant le Nutri-Score dès son lancement en 2017. «C’est un outil auquel on a beaucoup cru», assure le porte-parole du groupe. Mais la mise à jour du mode de calcul, actée en 2023 par le comité scientifique du Nutri-Score, est contestée par Danone et d’autres industriels dont les produits deviennent moins bien notés.
«C’est lamentable, extrêmement choquant, de voir que Danone abandonne le Nutri-Score lorsque les règles du jeu établies par des scientifiques ne lui plaisent plus», a réagi Serge Hercberg, professeur de nutrition à l’université Sorbonne Paris Nord et concepteur du Nutri-Score. Non membre du comité scientifique, il défend le travail de ces experts qui «travaillent ni pour faire plaisir aux industriels ni pour les pénaliser de façon gratuite mais uniquement en fonction de l’intérêt de la santé publique».
«Marche arrière»
Même si la quantité de sucres est équivalente, la distinction entre yaourt solide et à boire est «pertinente» pour le professeur Hercberg : le second est surtout pris en dehors des repas, comme «snack liquide», au risque d’amener «à une consommation importante chez les enfants et adolescents». «Cela permet d’alerter le consommateur sur le fait que ces produits doivent être consommés de façon raisonnable», estime Serge Hercberg.
L’UFC-Que-Choisir dénonce «l’argumentaire pseudo-nutritionnel de Danone» et estime que l’épisode apporte «une nouvelle preuve que l’affichage du Nutri-Score sur la base du volontariat ne permet pas d’assurer la bonne information des consommateurs». L’association de consommateurs Foodwatch a qualifié d’«inadmissible» la «marche arrière» de la multinationale française. «Que Danone ne nous fasse plus croire qu’elle se préoccupe de la santé des consommateurs», a tancé Audrey Morice, chargée de campagnes de l’organisation.
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La décision de Danone concerne uniquement ses yaourts à boire, à savoir les versions liquides des marques Actimel, Danonino, Hi-Pro, Danone ou encore Activia, a précisé un porte-parole. Ceux-ci sont désormais considérés comme des boissons plutôt que des aliments et donc notamment comparés à l’eau, qui seule peut être classée A. Suivent le lait écrémé et demi-écrémé (B), puis le lait entier (C). Avec la révision de l’algorithme, Actimel, promu par le groupe comme un produit santé, passe de A ou B à D. Le yaourt à boire pour enfants Danonino plonge aussi à D, «comme une boisson soda sucrée», déplore le porte-parole, remarquant que le yaourt Danonino consommé à la cuillère «reste en B» avec «des valeurs nutritionnelles similaires».
L’entreprise Ecotone, propriétaire du fabricant de biscuits et boissons végétale Bjorg, avait été épinglée fin 2023 par l’association UFC-Que Choisir pour avoir fait disparaître le Nutri-Score de ses emballages juste avant le déploiement du nouvel algorithme. Ecotone s’est défendu d’afficher depuis avril 2023 un «Planet-score» pour «sensibiliser» les clients à l’impact environnemental des produits. Le Nutri-score reste une «boussole pour élaborer nos nouvelles recettes» et reste disponible en ligne, précise l’entreprise, qui affirme que la part de ses produits notés A, B ou C reste «dans les mêmes ordres de grandeur» avec la nouvelle méthode de calcul.