Cinq adolescents se sont mêlés au rassemblement contre l’extrême violence, sur un parking, entre la médiathèque et le Quick. Ils ont plusieurs fois feint de s’en aller, mais sont toujours revenus tendre une oreille. Parfois, ils se vieillissent par la gestuelle : les épaules qui roulent, comme s’ils étaient déjà tauliers du quartier. Le moins bavard d’entre eux lâchera quand même : «Il est où le maire ? Il vient ? J’ai deux mots à lui dire…» On l’a reconnu illico : il apparaît dans un clip de rap sur YouTube, dans lequel sont empilés des rimes (sur les sous) et des regards de brutes (sous les tours). Le contraste se niche là : sur ce parking, toutes les postures de ces cinq-là, collégiens ou à peine lycéens, ne résistent pas à quelques mimiques d’enfants pas encore gommées. A leur façon de sautiller, de tenir un ballon, de baisser les yeux, de choisir les mots : «La dame est gentille», «C’est le monsieur qui m’a dit…», «La violence, ce n’est pas bien, monsieur.» Dans la foule dispersée, des mères et des pères de famille parlent d’eux, indirectement : ces bandes, en bas des blocs, à qui la rue lègue tous ses vices d’un coup, en accéléré et dont on ne sait plus anticiper les limites. Jeudi après-midi, une cinquantaine d’habitants de Croix-Rouge, un gigantesque quartier populaire de Reims, s’est réunie une heure à l’appel de l’Association des travailleurs maghrébins de France (ATMF) et d’un comité de défense de locataires.
Reportage
Dans le quartier de Croix-Rouge, à Reims : «J’ai peur de l’américanisation de nos quartiers»
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Le 2 mars, dans le quartier de Croix-Rouge, en banlieue de Reims, où un photographe du journal L'Union à été agressé violemment lors d'un reportage. (Denis Allard/Libération)
par Ramsès Kefi
publié le 7 mars 2021 à 21h10
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