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Enquête Libé

Dans l’enfer de l’usurpation d’identité : le labyrinthe administratif, les contraventions et «Kevin Costner»

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Dans un système presque intégralement automatisé, des centaines de personnes verbalisées à tort après que leurs plaques de voiture ou leur permis de conduire ont été contrefaits tentent de stopper la folle machine administrative. Parmi elles, une journaliste de «Libération».
publié le 22 août 2023 à 15h01

Pendant quelques jours, sur la desserte vintage en bois et scoubidou, les dizaines de lettres sont restées ensevelies sous des papiers épars, eux-mêmes recouverts par des prospectus : les oubliés de la vie courante, le capharnaüm en attente d’être décacheté. Et puis un soir de mars et de désœuvrement, voilà qu’ont jailli de ces enveloppes un tas de problèmes flanqués d’une Marianne. Des formulaires colorés avec de petits caractères en pagaille, des cases partout et ce titre : «Avis de contravention». La «description de l’infraction» tient en peu de mots : «Excès de vitesse». Le 3 novembre 2022, à 14h54, une Renault a été flashée à 91 km/h sur l’A86, en direction de Bobigny, faisant fi de la limitation à 70 km/h. Résultat : 68 euros d’amende, avec ristourne possible à 45 en cas de paiement dans les quinze jours.

L’adresse du destinataire, le «Boulevard de Bouchechouanet» dans le VIIIe arrondissement de Paris, n’existe pas. Dans la deuxième lettre, l’artère fantasque est maintenant sise dans le IXe arrondissement tandis que la Renault roule à 77 km/h sur l’A14, à Puteaux, selon «l’appareil de contrôle homologué de type FM1-Poliscan». Au gré des enveloppes, ça continue. En janvier 2023, la voiture flambe à 110 km/h sur l’A15 à Cergy. La revoilà à Montreuil, à 79 km/h sur l’A3, toujours sous le regard du Poliscan et de «l’agent verbalisateur N° 154209». Parfois, ça ne tient pas à grand-chose, comme ce 1er novembre 2022 à 4 heures du matin