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Libération
Enquête

Dans un Ehpad public du Puy-de-Dôme : une «maltraitance institutionnelle» admise par tous

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A l’établissement Ambroise-Croizat, près de Clermont-Ferrand, salariées et direction reconnaissent l’existence de graves dysfonctionnements, mais s’en renvoient la responsabilité, entre manque d’effectifs, autoritarisme et négligences. Dans ce contexte, les personnes âgées trinquent.
A l’Ehpad public Ambroise-Croizat, une salariée a porté plainte contre la directrice pour «harcèlement» et la famille d’une résidente en a déposé une fin janvier auprès du procureur pour «mise en danger», «non-accès aux soins» et «maltraitance institutionnelle». (Anke Doerschlen/Plainpicture)
publié le 20 avril 2022 à 21h16

Madeleine (1) ne fait pas dans la demi-mesure : «En prison, ils sont mieux qu’ici. Comment on peut vivre comme ça ? Des fois, j’ai envie de pleurer.» L’octogénaire répète souvent que ce qu’elle vit et voit donne «envie de pleurer». Elle réside depuis quelques années à l’Ehpad public Ambroise-Croizat au Cendre (Puy-de-Dôme) et n’y trouve plus guère de motifs de réjouissance. «Les soins sont vite faits, on est lavés une fois tous les 36 du mois. Elles [les aides-soignantes] t’attrapent comme une merde, quand elles te font la toilette il faut serrer les dents», déroule-t-elle. Elle s’est retrouvée avec le corps tuméfié à cause de manipulations indélicates, doit parfois réclamer pour être essuyée aux toilettes, a déjà passé deux semaines sans douche. «Si l’effectif n’est pas là, on ne fait pas de douche pendant quinze jours, facile», confirme Pauline, une salariée, qui a demandé un strict respect de son anonymat, à l’instar de toutes ses collègues, par peur de représailles.

«Ce n’est pas une boîte à fric, et pourtant il y a de la maltraitance institutionnelle», lâche Sandrine, la fille de Madeleine, qui s’acquitte d’environ 1 200 euros par mois pour sa chambre. Les dysfonctionnements ne sont pas uniquement le fait de «sociétés cotées en bourse qui doivent faire du profit», comme le groupe Orpea,