Il s’agirait des premiers morts en lien avec la vague de chaleur intense qui écrase la France depuis le 19 juin. Alors que quatre départements demeurent en alerte rouge canicule, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a annoncé ce mercredi 2 juillet en conférence de presse que «plus de 300 personnes ont été prises en charge par les pompiers» dans l’Hexagone, et que deux personnes sont mortes «à la suite de malaises liés à la chaleur». Mais la ministre est allée trop vite. Libération fait le point.
Une personne âgée à Grenoble, un sans-abri à Besançon : qui sont les deux victimes évoquées par la ministre ?
Lors de sa prise de parole devant la presse ce mercredi matin, la ministre de la Transition écologique a fait état de deux morts en lien avec les températures caniculaires qui traversent la France ces derniers jours, sans toutefois fournir plus de détails sur l’identité des victimes et les conditions de leurs décès. Sollicité dans la foulée par Libération, l’entourage d’Agnès Pannier-Runacher nous a précisé que la ministre faisait référence à plusieurs articles de presse, dont celui d’Europe 1, annonçant deux morts en France en raison des fortes chaleurs. «Il n’y a rien de nouveau au sens où c’est sur la place publique depuis au moins hier», ajoute-t-on du côté de son cabinet.
La première victime est un homme de 71 ans, retrouvé mort mardi 1er juillet au matin dans sa résidence pour personnes âgées située à Grenoble, raconte Ici Isère. La police nationale a évoqué un décès «peut-être dû à la chaleur», souligne la radio locale. Une autre source policière interrogée par le Dauphiné Libéré est pour sa part encore plus prudente, et explique que les causes du décès n’ont pas encore été déterminées précisément.
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La seconde victime évoquée par la ministre de la Transition écologique est un homme sans domicile fixe, âgé d’une cinquantaine d’années, à Besançon (Doubs). Selon l’Est Républicain, la victime a été retrouvée inconscient sur le perron d’une église dans le centre-ville mardi 1er juillet, aux alentours de 9 heures. Selon les pompiers, contactés par France 3, l’homme en «situation de grande précarité» a été retrouvé en état de «raideur cadavérique».
En arrêt cardiorespiratoire, il a été déclaré mort sur place. Aucune trace d’agression n’a été relevée. Pour la maire écologiste de la ville, Anne Vignot, cette mort est «très certainement en lien avec la canicule en cours». «Un homme est mort de chaud», a-t-elle aussi ajouté dans un communiqué, rappelant que «la chaleur tue, encore davantage que le froid».
Annonce précipitée
Après ce premier bilan livré par Agnès Pannier-Runacher ce mercredi, son entourage a rapidement plaidé «la maladresse» de cette annonce précipitée, soulignant qu’il n’y avait eu «aucune confirmation officielle des autorités» démontrant que ces décès sont liés à la canicule. Selon la même source, le ministère de la Transition écologique n’est en effet pas «l’autorité compétente en la matière», et le propos d’Agnès Pannier Runacher ne «vaut pas confirmation».
L’entourage de la ministre nous renvoie au ministère de la Santé. Le centre de crises sanitaires, dépendant de ce ministère, répond qu’il n’est «pas possible de suivre les décès imputables aux épisodes de chaleur de manière quotidienne puisque le suivi exhaustif de la mortalité remontée par la certification électronique avec mention de la cause et lieu de décès n’est pas automatique». Et d’ajouter qu’un premier bilan de la mortalité liée à cette vague de chaleur sera publié d’ici les 15 prochains jours - délai nécessaire pour consolider les résultats. Son but : «Donner un premier ordre de grandeur de l’excès de mortalité toutes causes pendant la canicule.»
Reportage
Par ailleurs, dans le cas de la première victime, le cabinet du maire de Grenoble, Éric Piolle, a contesté le lien effectué entre canicule et cause de la mort du septuagénaire. Le certificat de décès, réalisé par un médecin et consulté par la ville, indique notamment que l’homme est mort «de cause naturelle». «Cette personne était suivie pour une pathologie nécessitant des passages infirmiers quotidiens», renseigne également l’entourage d’Éric Piolle, tout en ajoutant : «La canicule peut avoir joué un rôle, mais ce n’est pas la cause principale du décès.»
Concernant le sans-abri retrouvé inanimé à Besançon, même si la maire Anne Vignot fait le lien entre la canicule et la mort de cet homme, son cabinet précise auprès de Libé n’avoir aucune confirmation officielle des autorités. «Il s’agit des informations communiquées par les pompiers et reprises par la presse», souligne-t-on. Une enquête a ainsi été ouverte pour déterminer les causes exactes de son décès, et une autopsie aura lieu dans les prochains jours, renseigne Ici Besançon.
Un troisième décès «probablement lié à la canicule» enregistré à Besançon
Alors que le bilan évoqué par la ministre Agnès Pannier-Runacher fait état de deux victimes, la mort d’une autre personne – un homme de 35 ans résidant à Besançon – pourrait elle aussi être en lien avec la canicule. L’information a d’abord été relayée par l’Est républicain : lundi 30 juin, au milieu d’après-midi, cet ouvrier pour une entreprise de travaux publics a été victime d’un malaise, sur le trajet retour d’un chantier se déroulant en extérieur. Alors qu’il se trouve dans une camionnette avec plusieurs de ses collègues, ces derniers constatent ainsi que le trentenaire est inanimé. Ils contactent rapidement les secours.
Sur place, les sapeurs-pompiers du Doubs constatent que l’homme est en arrêt cardio-respiratoire, fait savoir à Libération le capitaine Fabrice Marche. Le trentenaire est rapidement transporté dans un état grave vers l’hôpital Jean Minjoz de Besançon. Mais malgré les efforts de l’équipe médicale, il n’a pas pu être réanimé.
Sa mort est-elle en lien avec les températures extrêmes, jusqu’à 35,8 °C enregistrées à l’ombre dans la préfecture du Doubs pour la journée de lundi selon Météo-France ? Selon des témoins interrogés par le journal local, le jeune homme se serait en effet plaint à plusieurs reprises de la chaleur sur le chantier. «Il se plaignait de la chaleur depuis le matin», abondent également les sapeurs-pompiers du Doubs. Contactée par Libération, l’entreprise de BTP dans laquelle cet homme était employé n’a pas donné suite à nos sollicitations.
Pour éclaircir les circonstances de sa mort, une autopsie a été réclamée par le parquet de Besançon. Elle a eu lieu mardi, mais «n’a pas permis de déterminer les causes de la mort» du trentenaire, a fait savoir le parquet à France 3 Franche-Comté. Des analyses complémentaires sont donc en cours, et l’inspection du travail a été saisie.
La procureure par intérim de Besançon a pour sa part démenti mercredi en fin de journée tout lien entre ces deux morts suspectes dans la ville comtoise et l’épisode de canicule à ce stade de l’enquête. «En l’état des éléments en ma possession il m’est impossible de confirmer que les deux décès soient en lien avec la canicule», a déclaré Margaret Parietti.
Un ouvrier meurt sur un chantier à Auxerre
Autre victime potentielle de la chaleur en Bourgogne-Franche-Comté, cette fois à Auxerre (Yonne) : un ouvrier de 51 ans est mort mercredi après avoir fait un malaise sur un chantier. Selon les pompiers, il avait perdu connaissance la veille, mardi, vers 14h30, alors qu’il était occupé à des travaux de coffrage en béton sur un chantier de construction de bureaux sur le site de l’AJ Auxerre, le stade Abbé-Deschamps, indique France Bleu. Le département de l’Yonne faisait alors partie des seize départements placés en alerte rouge canicule. Le mercure frôlait les 40 °C. Le quinquagénaire, pris de convulsions, a rapidement été transporté à l’hôpital d’Auxerre, où il est décédé mercredi matin, a déploré une source au sein de l’AJ Auxerre. Le club a présenté sur X ses condoléances aux proches de cet ouvrier.
Le procureur d’Auxerre, Hugues de Phily, a annoncé avoir ouvert une enquête afin de déterminer les causes de mort de cet ouvrier du BTP, employé par une société de construction basée à Monéteau, au nord d’Auxerre. Une autopsie a également été ordonnée.
Mise à jour jeudi 3 juillet avec la mort d’un ouvrier du BTP à Auxerre