Le congé menstruel ne parvient toujours pas à convaincre les parlementaires. La Commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale a retoqué mercredi 27 mars au soir le premier article de la proposition de loi du député écologiste Sébastien Peytavie : il visait à instaurer un «arrêt menstruel» pour les femmes souffrant de règles douloureuses. «La majorité et la droite rejettent une avancée nécessaire pour les femmes atteintes de règles douloureuses et incapacitantes», a déploré sur X l’élu de Dordogne et rapporteur du texte. Le vote a été pourtant serré, preuve de la division de la majorité sur le sujet : il s’est joué à 16 voix contre et 16 voix pour. «Une seule voix aura manqué pour le faire adopter», regrette le député.
La proposition de loi prévoyait jusqu’à 13 jours d’arrêt maladie par an pour «menstruations incapacitantes», sans carence et intégralement payés par l’Assurance maladie, sous réserve d’un certificat médical. Il voulait également permettre le télétravail pendant cette période du mois, ou encore ouvrir les négociations en entreprise et dans la fonction publique pour aménager poste et temps de travail, afin de prendre en compte la «santé menstruelle des femmes».
Tribune
La députée LFI Clémentine Autain a également fait part sur X de «sa déception et incompréhension». Le texte avait déjà été écarté par les sénateurs en février, après de vifs débats : la droite et ses alliés centristes disaient redouter les «effets secondaires non désirés» de ce congé. Le principe d’un congé en cas de règles douloureuses commence pourtant à faire son chemin. L’Espagne, pionnière, l’a étendu au niveau national en février 2023.
En France, en plus d’entreprises comme Carrefour et l’Oréal, de plus en plus de collectivités le mettent en place ou prévoient de le faire. En mars 2023, Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) était devenue la première ville française à l’instaurer pour ses agentes. Puis d’autres municipalités, en particulier la ville de Lyon, Arras (Pas-de-Calais), Guyancourt (Yvelines) lui ont emboîté le pas. Des expérimentations ont également été lancées, sinon annoncées, à Strasbourg, Tours ou encore Paris. En fin d’année, c’était au tour de la Nouvelle-Aquitaine de commencer une expérimentation, première région à franchir le pas. L’idée s’installe même sur les bancs de la fac : la Sorbonne, à Paris, et l’université d’Angers l’ont instauré, celles de Bordeaux ou Montpellier le rendront possible à compter de la rentrée prochaine.
En s'opposant à l'instauration de l'#ArrêtMenstruel pour les très nombreuses femmes souffrant de règles douloureuses, les macronistes et la droite renvoient leur souffrance à une affaire privée. Déception et incompréhension. #DirectAN #endometriose @speytavie @MC_Garin pic.twitter.com/gB99yUTPCi
— Clémentine Autain (@Clem_Autain) March 27, 2024
Nouvel examen début avril
La majorité présidentielle reste pourtant frileuse sur le sujet. Alors que les finances publiques dérapent, des raisons économiques peuvent alimenter ses réticences. Selon des estimations du gouvernement, la mesure pourrait coûter entre 600 millions et un milliard d’euros par an, si la moitié des femmes utilise l’intégralité du congé. Le député rapporteur du texte table, lui, sur 100 millions d’euros par an pour la Sécu, estimant que 10 % des femmes y auraient recours.
Sébastien Peytavie n’entend pas lâcher le sujet pour autant. Il assure qu’il continuera de défendre le texte, qui sera de nouveau examiné en séance le 4 avril, lors de la niche écologiste. «La lutte peut-être longue, mais elle ne sera pas vaine», assure-t-il.
Mise à jour : à 10h20, avec l’ajout des collectivités et entitiés testant ou voulant tester le congé menstruel.