Il y a des luttes sociales qui font date. Le mouvement des gilets jaunes à l’hiver 2018-2019, les grèves contre le «plan Juppé» en fin d’année 1995, ou encore Mai 68. Il y a un siècle, la Bretagne a aussi connu la sienne, avec la grève des sardinières de Douarnenez. Dans les années 1920, cette petite ville côtière du Finistère, à 20 kilomètres au nord de Quimper, est championne de la mise en boîte de sardines, avec 21 conserveries localisées sur le port. Ces usines emploient très majoritairement des ouvrières – les hommes sont pêcheurs – soumises à des conditions de travail difficiles. Les sardinières font des journées à rallonge, de jour comme de nuit, en fonction de l’arrivage du poisson. Elles touchent une minuscule rétribution de 80 centimes par heure, «presque trois fois moins que le salaire normal de l’époque», explique Théo Bernard, historien et auteur de l’article Soviets et salaires : les sardinières dans la grève de Douarnenez (novembre 1924 - janvier 1925), paru dans le numéro 154 de la revue Cahiers d’Histoire.
Sept semaines de lutte
Fin novembre 1924, l’hiver arrive et, comme chaque année, la plupart des conserveries s’apprêtent à réduire leurs effectifs, voire à fermer leurs portes. Le contexte est inflammable : la population subit l’inflation de plein fouet, ce qui aggrave une misère déjà omniprésente dans le quotidien des travailleuses douarnenistes. A l’usine Carnaud, spécialisée dans la fabrication des boîtes de conserve, les ouvrières réclament une augmentati