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Quatorze femmes accusant Nicolas Hulot et PPDA répondent à Macron sur l’«inquisition»

Violences sexuelles : elles accusent PPDAdossier
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Une tribune publiée dans «le Monde» ce mercredi fustige les déclarations du président de la République après les révélations concernant l’ancien ministre et l’ex-présentateur.
Une tribune de quatorze femmes, publiée dans «le Monde» ce mercredi, qui se sont déclarées victimes de PPDA et Hulot critique les propos d'Emmanuel Macron. (Charles Platiau / AFP Ludovic MArin / RUTERS)
publié le 8 décembre 2021 à 10h53

Les confidences – volontairement rendues publiques – d’Emmanuel Macron en pleine affaire Hulot, dans son style du «en même temps» habituel, n’ont pas été du goût de tous et toutes. Après avoir reconnu que «c’est bien que la parole se libère», le président de la République avait ajouté : «Nous ne voulons pas, non plus, d’une société de l’inquisition.» Ce mercredi matin, quatorze femmes, qui se sont publiquement déclarées victimes des deux affaires ayant explosé ces dernières semaines concernant les comportements de Patrick Poivre d’Arvor et de Nicolas Hulot, lui répondent au long : «Quel est le rapport entre nos récits et l’Inquisition ? De nos intimités exposées naîtrait le risque de replonger la France dans une des périodes les plus sombres et les plus unanimement détestées de l’histoire occidentale ?» interrogent-elles dans une tribune publiée sur le site du Monde.

C’est notamment le terme «inquisition», très chargé et «symbole de l’obscurantisme, de la terreur et de l’arbitraire», qui fait réagir Nora Arbelbide Lete, Karin Bernfeld, Clémence de Blasi, Emmanuelle Dancourt, Aude Darlet, Cécile Delarue, Hélène Devynck, Maureen Dor, Justine Ducharne, Margot Cauquil-Guèze, Stéphanie Khayat, Camille Pascaud, Muriel Reus et Cécile Thimoreau. «Vous nous mettez du côté des inquisiteurs, figures honnies de la mémoire collective, représentants des pires atrocités du passé. Nos récits porteraient en germe ces tribunaux de l’horreur et de l’injustice. […] Nous sommes des menteuses selon nos agresseurs, une menace pour le pays selon vous», écrivent-elles.

«Une pièce de plus dans la machine à taire»

D’après ces femmes, la réaction d’Emmanuel Macron risque même de nuire à la libération de la parole des victimes. «En agitant la menace inquisitoriale, […] vous nous dites que nous sommes dangereuses. Une pièce de plus dans la machine à taire. Mettre nos misères en lumière risquerait d’enfoncer la France dans les ténèbres ? Nos récits ne devraient-ils pas faire avancer le droit plutôt que de le faire reculer jusqu’aux horreurs de l’Inquisition ?»

Les quatorze qui prennent la parole se défendent également de toute arrière-pensée : «Nous avons parlé par devoir citoyen. Nous n’avons rien d’autre à y gagner que de dire une vérité, même dérangeante, et d’éclairer le pays sur le traitement des violences sexuelles, sur l’usage que font certains hommes de leur pouvoir, sur les complaisances qui les y autorisent, sur l’impunité dont ils jouissent.»

En conclusion, elles reviennent sur les propos de Macron ou des agresseurs et de leurs soutiens, qui ont parfois tenté d’inverser le rôle des victimes et des coupables : «Nous ne voulons pas d’une société où les victimes de la violence des dominants seraient tenues au silence et condamnées à l’opprobre, à l’infamie et à la caricature si elles transgressent cette règle. Nous ne sommes pas les bourreaux, monsieur le président de la République. Pourquoi faisons-nous si peur ?»

La sortie de Macron faisait suite à l’affaire Hulot, qui avait pris une nouvelle tournure lors d’une enquête d’Envoyé spécial diffusé fin novembre. Alors que le parquet de Paris avait dans la foulée ouvert une enquête préliminaire, l’ancien ministre de Macron avait annoncé à la veille de la diffusion quitter «définitivement» la vie publique. Au total, ce sont au moins six femmes, dont l’une mineure au moment des faits, qui le mettent en cause.

Quelques semaines auparavant, ce sont les agissements de Patrick Poivre d’Arvor sur lesquels la lumière avait été braquée. Dénonçant le comportement abusif de l’ancien présentateur de TF1, huit femmes avaient raconté à Libération les agressions qu’elles disent avoir subies de sa part. Leurs récits et les procès-verbaux esquissaient un mode opératoire rodé et un sentiment de totale impunité.