Le silence demeure dans les cabinets. Malgré la recommandation en 2019 de la Haute Autorité de santé (HAS), le repérage des violences conjugales par les médecins, censé être systématique, reste très marginal, selon un baromètre de la HAS, publié ce vendredi 24 novembre. A la veille de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, ce sondage auprès de 1 000 femmes, effectué en octobre 2022 et en octobre 2023, relate que seulement 3 % d’entre elles disent avoir été interrogées par leur médecin généraliste sur d’éventuelles violences conjugales lors d’une consultation.
De surcroît, seules 14 % d’entre elles ont été questionnées plus largement «sur leur relation avec leur partenaire». Une proportion d’autant plus dérisoire que la HAS affirme qu’«en moyenne, 3 à 4 femmes sur 10 pourraient être victimes de violences conjugales dans la patientèle d’un médecin généraliste». Et parmi ces 1 000 sondées, une femme sur cinq déclare subir ou avoir subi des violences physiques, verbales, psychologiques, sexuelles de la part de leur partenaire, quand 2 % ont affirmé les subir actuellement, tandis que 18 % évoquent des faits passés.
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Les femmes favorables à ce repérage
Comment expliquer ces mauvais chiffres, alors que les médecins sont en première ligne repérer ce genre de situation à risque ? Parmi les freins évoqués, la Haute Autorité évoque la «peur de dégrader la relation avec la patiente», un «sentiment d’impuissance et de découragement», mais aussi une «méconnaissance de l’ampleur du problème ou du phénomène d’emprise». Pourtant, 96 % des femmes interrogées considèrent qu’un questionnement systématique par le médecin sur les violences est une bonne chose. De quoi battre en brèche les craintes des médecins d’une rupture de confiance.
L’Observatoire des violences envers les femmes, créé par la Seine-Saint-Denis, avait également démontré dans une enquête l’importance de l’utilisation du questionnaire systématique, cette fois-ci par le service social du département. Sur les 216 femmes interrogées en 2021, 77 % d’entre elles avaient répondu facilement, quand bien même la raison de cette entrevue ne portait majoritairement pas sur les violences. Les trois quarts d’entre elles avaient subi au moins une forme de violence (psychologiques, économiques, physiques, sexuelles…) au cours de leur vie.